Sous la direction de Pr. Alice Desclaux et Pr. Abdoulaye Touré, Eva Barranca, volontaire internationale (VI) au Centre de recherche et de formation en infectiologie de Guinee (CERFIG) entre 2016 et 2021, a soutenu sa thèse de doctorat (PhD) en sante publique couplée à une approche anthropologique intitulée « De la préparation à la riposte aux épidémies : Surveillance et santé communautaire après Ebola en Guinée » réalisée à l’Université de Montpellier (unité de recherche TransVIHMi). La soutenance a eu lieu ce vendredi 16 décembre 2022 à l’Institut de recherche pour le développement, dans l’Amphithéâtre des Plantes, au 911 Av. Agropolis, 34394 Montpellier.
Le jury était composé de :
- Dr Anne-Marie MOULIN, Directrice de recherche émérite, CNRS (Rapporteure)
- Pr Nicolas MEDA, Professeur, Université Joseph Ki-Zerbo de Ouagadougou (Rapporteur)
- Pr Alice DESCLAUX, Directrice de recherche, IRD (Directrice)
- Pr Abdoulaye TOURE, Professeur, Université Gamal Abdel Nasser de Conakry (Co-encadrant)
- Pr Tamara GILES-VERNICK, Directrice de recherche, Institut Pasteur Paris (Examinatrice)
- Pr Alioune CAMARA, Professeur, Université Gamal Abdel Nasser de Conakry (Examinateur)
- Pr Nicolas MEDA, Professeur, Université Joseph Ki-Zerbo de Ouagadougou (Rapporteur)
Résumé de la thèse
Les politiques de préparation aux épidémies menées aux niveaux international et national supposent qu’en anticipant la survenue d’épidémies et en s’y préparant, il est possible de lutter plus efficacement contre ces menaces. La surveillance de santé publique est reconnue comme un pilier de la préparation, et au niveau local il est recommandé d’améliorer les capacités de détection des émergences à travers la « surveillance à base communautaire », réalisée par et au plus près des populations. En Guinée, le recours aux agents communautaires est promu pour la réalisation de la surveillance et d’autres interventions de santé publique depuis que le pays a connu sa première épidémie d’Ebola entre 2013 et 2016. Il existe encore peu d’études publiées au niveau international qui analysent la mise en œuvre de ces stratégies. Cette thèse vise à identifier les facteurs qui entravent ou favorisent les interventions de santé publique à base communautaire, concernant notamment les acteurs communautaires et leur insertion dans le système de santé.
Dans une approche qui articule la santé publique et l’anthropologie, la méthode employée repose sur des observations à Conakry et dans la région de N’Zérékoré, et des entretiens concernant la préparation aux épidémies et la santé communautaire menés auprès d’agents communautaires, de professionnels de santé et d’acteurs institutionnels. Ces données ont été complétées par des enquêtes de terrain menées en contexte de riposte à l’épidémie d’Ebola survenue en 2021, ainsi que dans le cadre de la lutte contre le Covid-19.
L’enquête de terrain, présentée après une contextualisation historique des interventions actuelles de la préparation aux épidémies, montre que la surveillance à base communautaire n’est pas encore totalement déployée en Guinée. Comme les autres interventions de surveillance et de santé communautaire menées au niveau local, la réalisation de la surveillance à base communautaire est entravée par le statut précaire des agents communautaires, qui sont encore peu intégrés dans le système de santé. Quand ils s’engagent, comme d’autres professionnels de santé, dans la riposte aux épidémies, ces agents communautaires exercent toujours dans des conditions défavorables malgré leur implication en « première ligne ». C’est notamment le cas des agents désignés pour réaliser le suivi des cas contacts lors de l’épidémie d’Ebola de 2021. Dans ce contexte, les acteurs communautaires font néanmoins preuve d’initiatives, et tentent d’améliorer les relations souvent difficiles entre les populations et le système de santé. Par ailleurs, une enquête spécifique menée auprès de patients et de professionnels propose un cadre éthiquement acceptable pour l’annonce de diagnostic ou de résultats biologiques dans le cadre de la réalisation de la surveillance.
Cette thèse s’inscrit dans les travaux sur la préparation aux épidémies, encore peu nombreux à être basés sur des enquêtes de terrain, notamment dans les pays du Sud. Nos résultats pourront guider les institutions de niveaux national, régional et global, pour élaborer des politiques et interventions de surveillance et de santé communautaire plus acceptables pour les acteurs de première ligne et les populations concernées.
Eva BARRANCA
Docteure en santé publique et anthropologie – Projet EboHealth
IRD UMI TransVIHMI, DR Occitanie – Montpellier, France
Centre de recherche et de formation en infectiologie de Guinée (CERFIG)
CAMPUS Hadja Mafory Bangoura, B.P 6629P – Conakry, Guinée