A PROPOS
Le projet MOUT se propose d’apporter de nouvelles connaissances concernant les modalités de diffusion de la Maladie à Virus Ebola (MVE) dans deux des pays les plus touchés par cette fièvre hémorragique : la Guinée et le Congo.
Le projet MOUT se propose d’apporter de ne nouvelles connaissances concernant les modalités de diffusion de la Maladie à Virus Ebola (MVE) dans deux des pays les plus touchés par cette fièvre hémorragique : la Guinée et le Congo.
En effet, les résurgences et les réémergences de l’épidémie imposent un changement de paradigme dans la compréhension de la circulation de ce virus, puisqu’il ne s’agit plus d’une zoonose, mais d’une résurgence virale, c’est-dire de la réactivation du virus dans le corps d’une personne soit guérie, soit asymptomatique lors de la précédente épidémie.
En raisonnant de manière critique sur les modèles de diffusion du virus proposés par les épidémiologistes, nous allons essayer de comprendre comment et pourquoi les localités touchées par Ebola ont constitué un terreau favorable pour la propagation du virus et pour ses résurgences. Dans ce but, nous mettons en relation la diffusion du virus avec la mobilité des populations.
En effet, le projet MOUT conjugue, de manière innovante, des théories et des concepts de la sociologie des migrations et de l’anthropologie médicale pour comprendre comment et pourquoi les populations africaines se déplacent, en transportant avec elles, comme « espèces compagnes », des agents pathogènes, qui rencontrent des terreaux plus ou moins favorables pour leur éclosion et leur développement. Pour mieux cerner ces aspects, le projet est construit autour du concept central de motilité (Kaufman, Bergman et Joye, 2004).
Ce concept crée un pont entre la mobilité sociale et géographique, en montrant que la possibilité de se déplacer dépend de plusieurs facteurs : la présence d’infrastructures, l’accessibilité des moyens de transport, les capacités et compétences individuelles (organisation, mobilisation de réseaux etc.). La motilité a également une dimension plus subjective, qui décrit comment l’individu évalue ses compétences et les opportunités offertes par son environnement, pour prendre enfin la décision de se déplacer ou de rester sur place.
L’approche théorique et méthodologique du projet MOUT permet d’approfondir les modèles des épidémiologistes en montrant comment la mobilité suit les chemins du lien social et est dictée à la fois par l’affectivité et par la nécessité de mobiliser des réseaux amicaux et familiaux pour accéder à des services rares, surtout en milieu rural, comme l’éducation ou la santé.
Nous prenons en compte aussi bien les individus qui se déplacent que ceux qui restent immobiles, en montrant l’hétérogénéité et les identités plurielles des membres de la soi-disant « communauté villageoise » et en déconstruisant ce concept.
Nous étudions la diversité des profils sociologiques, leurs relations avec les pratiques de mobilité et nous analysons également la capacité des populations à éviter la MVE en mobilisant des savoirs médicaux et prophylactiques endogènes, ou bien des compétences acquises pendant les dernières épidémies d’Ebola.
Les chercheurs du projet MOUT utilisent les méthodes traditionnelles de l’anthropologie, avec des enquêtes de terrain de longue durée visant à atteindre, autant que possible, les conditions pour une véritable observation participante.
Ils y associent la recherche documentaire sur l’histoire de la santé dans les localités étudiées, les entretiens libres et semi-directifs et les entretiens collectifs visant à saisir les opinions et les représentations. La collecte des récits de vie et des trajectoires de mobilité est aussi un instrument précieux, surtout pour retracer les parcours des guéris d’Ebola.
L’enquête de terrain prévoit des descriptions statiques, visant à rendre intelligibles les structures sociales et à comprendre les structures de la parenté, les activités socio-économique, l’organisation politique et les pratiques religieuses. Les chercheurs effectuent ensuite des descriptions dynamiques axées sur la mobilité des membres des familles et des catégories socio-professionnelles identifiées, en accompagnant si possible les interviewés dans certains déplacements.
Le croisement des données recueillies à travers les descriptions statiques et dynamiques permet de mieux comprendre les déterminants économiques et socio-culturels de la mobilité, en établissant des liens entre les inscriptions sociales des individus et leurs pratiques de mobilité